La température corporelle : conséquence des apports et pertes de chaleur | ||
---|---|---|
Précédent | Le maintien de la température corporelle chez les Mammifères | Suivant |
Les Mammifères conservent une température interne quasi-constante. Cette stabilité résulte de l'équilibre entre pertes et gains de chaleur, processus impliquant de multiples acteurs. Ils agissent de manière coordonnée selon une boucle, dite de régulation.
Comment est déterminée la température corporelle ?
Chez les Mammifères, la température centrale est définie comme la température du noyau, qui correspond à l’ensemble des organes et artères. Elle a la particularité de ne quasiment pas varier. Son maintien à 37°C dans l'espèce humaine est lié à la présence d'une source de chaleur.
La température périphérique est définie comme la température de l’enveloppe corporelle, réprésentée par les tissus cutanés et sous-cutanés, épiderme, derme et tissu adipeux. Contrairement à la température du noyau, la température de l'enveloppe varie avec les fluctuations de la température de l'environnement, la peau étant le constituant corporel directement en contact avec le milieu.
Chez les Mammifères, le noyau représente environ 80 % de la masse corporelle contre 20 % pour l’enveloppe. Ces deux ensembles sont connectés par la circulation sanguine qui assure les transferts de chaleur.
La thermogenèse est la production de chaleur. Les principaux acteurs de la thermogenèse sont le tissu adipeux brun et le tissu musculaire mais la plupart des tissus peuvent la réaliser. La chaleur est produite par divers mécanismes permettant la libération d’énergie calorifique. Il s'agit le plus souvent d'oxydations.
La thermogenèse peut être mise en évidence en mesurant la consommation de dioxygène des animaux. Placés dans un environnement dont la température est inférieure de 4°C à la température ambiante, des Rats présentent une intensité respiratoire supérieure de 0,5 l.h-1.kg-1 à l'intensité respiratoire à température ambiante. La consommation supplémentaire de dioxygène est vraisemblablement impliquée dans la production de chaleur.
Les tissus adipeux brun et blanc sont distincts par leurs fonctions et leur organisation. Le tissu adipeux brun est responsable de la production de chaleur. Le tissu adipeux blanc permet le stockage d'énergie sous forme de triglycérides, joue le rôle de protection mécanique et thermique pour les organes qu'il entoure, et a des fonctions endocrines. Le tissu adipeux brun est formé d'adipocytes bruns dont le noyau est central et dont le cytoplasme contient de nombreuses gouttelettes lipidiques. Le tissu adipeux blanc est constitué d'adipocytes blancs dont le noyau est périphérique et l'essentiel du volume est occupé par une goutte lipidique centrale.
Les adipocytes bruns contiennent des mitochondries assurant la libération de chaleur à partir de la dégradation des acides gras.
Ils possèdent à leur surface des récepteurs β-3 adrénergiques. La noradrénaline, libérée par les terminaisons de neurones sympathiques à proximité des adipocytes bruns, se fixe sur ces récepteurs et provoque l’activation d’une adénylate cyclase intracellulaire par l'intermédiaire d'une protéine G. Cette enzyme catalyse la production d’AMPc (adénosine monophosphate cyclique) à partir d’ATP (adénosine triphosphate). Elle active une protéine kinase A qui phosphoryle alors une lipase hormonosensible. Cette dernière clive les triglycérides en acide gras qui, après être entrés dans les mitochondries, subissent une β-oxydation dans la matrice. Elle permet l’alimentation de la chaîne respiratoire en protons. Les protons s’accumulent dans l’espace intermembranaire et le gradient en résultant est résorbé grâce à une protéine découplante appelée thermogénine. L’énergie électrochimique du gradient de protons est ainsi convertie en chaleur. L'activation de la thermogénine est due aux acides gras résultant du clivage des triglycérides, qui inhibent parallèlement la formation d’ATP par l’ATP synthase.
La production de thermogénine est contrôlée au niveau transcriptionnel par les catécholamines et les hormones thyroïdiennes. Les adipocytes bruns contiennent de la T4-5’ déiodase, catalysant la désiodation de la tétraiodothyronine circulante en triiodothyronine active.
La thermogénine est donc responsable du découplage entre résorption du gradient de protons et synthèse d’ATP. La chaleur ainsi produite est répartie dans l’organisme par la circulation sanguine, le tissu adipeux brun étant riche en vaisseaux sanguins.
La libération de la chaleur par le tissu adipeux brun est essentielle chez les Mammifères hibernants ou semi-hibernants mais aussi chez les nouveaux-nés. Ils possèdent un abondant tissu adipeux brun qui leur permet de produire de la chaleur nécessaire au maintien de leur température.
La thermolyse est une perte de chaleur. Elle permet de lutter contre un surplus de chaleur responsable d'une augmentation de la température. Parmi les mécanismes de thermolyse figure l’évaporation. Il s'agit d'une vaporisation, définie comme une transition entre l’état liquide et l’état gazeux. La vaporisation consommant de l’énergie, elle entraîne une perte de chaleur et est qualifiée d'endothermique. La thermolyse par évaporation est réalisée au niveau de la peau et de certaines muqueuses, et se traduit par divers phénomènes.
La sudation consiste en la production de sueur, composée de 95% à 99% d’eau mais aussi d'acide lactique , d'urée et de substances comme les ions sodium et chlorures. L'évaporation de la sueur est un processus qui permet un refroidissement important de la surface corporelle.
La sueur est produite par les glandes sudoripares sous le contrôle du système nerveux.
Les glandes sudoripares humaines sont des glandes tubuleuses pelotonnées munies de canaux acheminant la sueur jusqu’à la surface de la peau. Leur région sécrétrice, appelée peloton sudoripare, est localisée en profondeur, dans le derme.
La plupart des grands Mammifères produisent peu ou ne produisent pas de sueur, dont l'évaporation serait ralentie par la fourrure. L'évaporation d'eau permettant la perte de chaleur résulte généralement d'un halètement, appelé polypnée thermique. La fréquence respiratoire augmente, l’air en mouvement dans les voies respiratoires se charge d’eau provenant de la muqueuse, dont l'évaporation entraîne une perte thermique. Contrairement à la sudation, le halètement n'est pas accompagné d'une perte de sels. Lors du halètement, la fréquence respiratoire augmente et le volume d’air inspiré diminue proportionnellement, ce qui empêche l’hyperventilation qui pourrait être néfaste.
Le léchage est un troisième mécanisme à l'origine d'une thermolyse par évaporation d'eau. L’animal sécrète de la salive et se lèche les membres. La salive est répartie à la surface du corps et son évaporation est favorisée. Elle a un rôle semblable à ceux de la sueur et de l'eau de la muqueuse respiratoire. Ce phénomène est courant chez les Marsupiaux.
La balance existant entre thermogenèse et thermolyse permet à l'organisme de limiter les variations de la température corporelle centrale.