La filtration : production d'un liquide à partir du liquide circulant | ||
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Le métabolisme des animaux produits des déchets, substances non utilisables voire toxiques. Leur élimination est réalisée par la fonction d'excrétion.
Les organes excréteurs des Mammifères, et plus généralement des Vertébrés, sont représentés par les reins. Ils produisent l'urine, solution aqueuse contenant certains déchets du métabolisme, notamment azotés, évacuée dans le milieu. Comment est-elle produite ?
Les reins sont constitués d'unités structurales et fonctionnelles appelées néphrons. Un néphron est formé d'une sphère à double enveloppe, la capsule de Bowman, et d'un tubule urinaire. La capsule de Bowman est délimitée extérieurement par un épithélium simple et pavimenteux, le feuillet pariétal, et intérieurement par un épithélium formé de cellules présentant un corps cellulaire et des expansions, les podocytes. Les podocytes constituent le feuillet viscéral. Feuillet pariétal et feuillet viscéral ménagent entre eux un espace dit de Bowman. La capsule de Bowman enserre un bouquet de vaisseaux sanguins capillaires, le glomérule. L'ensemble constitue le corpuscule de Malpighi.
La paroi des vaisseaux sanguins capillaires du glomérule est formée d'un endothélium, épithélium simple et pavimenteux, percé de pores obturés par de fins diaphragmes. Ils sont qualifiés de fénêtrés. L'endothélium repose sur une membrane basale. Les extrémités des expansions des podocytes sont situées au contact de la membrane basale du feuillet viscéral, confondue avec celle de l'endothélium. Elles sont également reliées par de fins diaphragmes. Finalement dans le corpuscule de Malpighi, le sang des vaisseaux sanguins capillaires et le contenu de l'espace de Bowman sont séparés par les diaphragmes de l'endothélium et du feuillet viscéral ainsi que la membrane basale. L'ensemble constitue une barrière de filtration.
Le sang est amené au rein par une artère rénale, se ramifiant dans l'organe. Les artérioles auxquelles elle donne naissance sont à l'origine des vaisseaux sanguins capillaires des glomérules. Elles portent le nom d'artérioles afférentes.
Au niveau du corpuscule de Malpighi, les forces en présence déterminent les pressions suivantes :
la pression hydrostatique du sang dans les vaisseaux sanguins capillaires, tendant à faire sortir le liquide des vaisseaux ;
la pression osmotique du sang dans les vaisseaux sanguins capillaires, tendant à retenir le liquide dans les vaisseaux ;
la pression hydrostatique du liquide contenu dans l'espace de Bowman, s'opposant à l'entrée de liquide dans l'espace de Bowman.
La pression résultante correspond à la différence entre pression du sang dans les vaisseaux sanguins capillaires et les pressions osmotique du sang et hydrostatique du liquide contenu dans l'espace de Bowman. Appelée pression de filtration, elle a une valeur de l'ordre de 1,3 kPa dans l'espèce humaine. Elle provoque la sortie du liquide des vaisseaux sanguins capillaires vers l'espace de Bowman, à travers la barrière de filtration. Les mailles de la barrière de filtration ayant un diamètre de 8 nm environ et la membrane basale étant chargée négativement, seule l'eau et les substances dissoutes de petite taille passent dans l'espace de Bowman. C'est par exemple le cas de l'urée, déchet azoté du métabolisme. Les cellules sanguines, les protéines volumineuses ou chargées négativement sont retenues dans les vaisseaux sanguins capillaires. Le liquide formé est l'urine primitive. Le sang des vaisseaux sanguins capillaires est drainé par les artérioles efférentes tandis que l'urine est prise en charge par le tubule urinaire. Sa composition est alors modifiée par le jeu de réabsorptions et de sécrétions sélectives, qui la transforment en urine définitive.
Ainsi dans le corpuscule de Malpighi, le sang est épuré par un processus de filtration. En raison de la taille des mailles de la barrière de filtration et du moteur de la filtration, il est qualifié d'ultrafiltration sous pression.
D'autres types d'organes excréteurs existent chez les animaux.
Les Plathelminthes possèdent des protonéphridies constituées de cellules appelées cyrtocytes, localisées à l'extrémité de tubules urinaires, et dispersées dans le mésenchyme. Les cyrtocytes sont formés d'un corps cellulaire et d'un prolongement portant un faisceau de flagelles, en continuité avec le tubule urinaire. En conséquence les cyrtocytes portent également le nom de cellules flamme. Le battement des flagelles dans le tubule urinaire met en circulation le liquide qu'il contient. Une dépression est générée à l'extrémité du tubule, et sous l'effet de la pression hydrostatique régnant dans le compartiment interstitiel, le liquide interstitiel est filtré à travers la paroi du prolongement du cyrtocyte et du tubule urinaire. Il donne naissance à l'urine primitive.
Les Annélides adultes possèdent pour leur part des métanéphridies, tubules ouverts par un pavillon cilié appelé néphrostome sur les cavités cœlomiques. Le liquide sanguin est filtré à travers la paroi du vaisseau sanguin dans lequel il circule et la paroi de la cavité cœlomique associée, en raison de la différence des pressions régnant dans les deux compartiments. Le liquide ainsi produit est mélangé au liquide cœlomique. Il passe dans les métanéphridies du fait des battements des cils du néphrostome qui génèrent un courant de liquide. L'urine primitive est ainsi formée.
Dans tous les cas, l'urine primitive est transformée en urine définitive par des réabsorptions et sécrétions sélectives.
Finalement, la fonction excrétrice consiste en l'épuration du milieu intérieur. Bien que les organes excréteurs ont des structures différentes, ils réalisent généralement l'épuration par un processus de filtration sous pression conduisant à la formation d'un liquide contenant les déchets et évacué hors de l'organisme, l'urine.
Les différences de pressions de part et d'autre d'une paroi délimitant deux compartiments liquidiens existent dans tous les organes chez les Vertébrés. Elles concernent les compartiments sanguin et interstitiel.
Dans l'intestin grêle des Vertébrés, l'épithélium est soutenu par un tissu conjonctif lâche appelé chorion. Il est imprégné de liquide interstitiel, extracellulaire et intratissulaire. Il est également parcouru de vaisseaux sanguins capillaires et de vaisseaux lymphatiques capillaires.
liquide interstitel | sang | |
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cellules | leucocytes | érythrocytes : 4.106 à 5,7.106.mm-3 ; leucocytes 4.103 à 10.103.mm-3 |
Na+ | 135 mmol.l-1 | 138 à 142 mmol.l-1 |
K+ | 5 mmol.l-1 | 3,5 à 4,5 mmol.l-1 |
Ca2+ | 2,5 mmol.l-1 | 2,25 à 2,6 mmol.l-1 |
Mg2+ | 1 mmol.l-1 | 0,74 à 1 mmol.l-1 |
Cl- | 120 mmol.l-1 | 100 à 110 mmol.l-1 |
H2PO4 - | 1,5 mmol.l-1 | 0,8 à 1,35 mmol.l-1 |
HCO3 - | 27 mmol.l-1 | 25 à 28 mmol.l-1 |
protéines | 0,5 à 20 g.l-1 | 70-80 g.l-1 |
Liquide présent dans les espaces intercellulaires, le liquide interstitiel a une composition voisine de celle du sang dont il n'est séparé que par la paroi des vaisseaux sanguins. Cependant, il ne contient ni érythrocyte ni lipoprotéine et les protéines y sont bien moins concentrées que dans le sang. Quelle est son origine ?
Les pressions en présence dans le dispositif constitué du liquide interstitiel, du sang et des vaisseaux sanguins capillaires sont :
la pression hydrostatique du sang dans les vaisseaux sanguins capillaires, tendant à faire sortir le liquide des vaisseaux notée PHc ;
la pression osmotique du sang dans les vaisseaux sanguins capillaires, tendant à retenir le liquide dans les vaisseaux notée POc ;
la pression hydrostatique du liquide interstitiel s'opposant à l'entrée de liquide dans le milieu interstitiel, notée PHi ;
la pression osmotique du liquide interstitiel favorisant l'entrée de liquide dans le milieu interstitiel, notée POi.
La résultante, appelée pression nette de filtration est donnée par la formule (PHc-Phi) – (POc-POi). Dans l'espèce humaine, elle a une valeur de 1,5 kPa environ à l'extrémité artérielle des vaisseaux sanguins capillaires et de -1,2 kPa environ à leur extrémité veineuse, en raison d'une diminution de la pression hydrostatique du sang le long des vaisseaux sanguins capillaires.
La paroi des vaisseaux sanguins capillaires constitue un filtre traversé par le liquide sanguin qui donne naissance au liquide interstitiel à l'extrémité artérielle des vaisseaux sanguins capillaires. L'eau, la plupart des électrolytes et des substances organiques dissoutes traversent le filtre alors que les cellules et les protéines sont retenues. Le liquide interstitiel est donc produit par un processus de filtration sous pression.
Une partie du liquide interstitiel regagne le sang à l'extrémité veineuse des vaisseaux sanguins capillaires par un processus semblable, appelé réabsorption. La partie restante est drainée par les vaisseaux lymphatiques capillaires.
Les échanges de liquide et de substances dissoutes ainsi décrits permettent le renouvellement en masse du liquide interstitiel, qui joue un rôle central dans les apports de nutriments et de dioxygène aux cellules qu'il baigne, et le drainage des déchets du métabolisme, dioxyde de carbone et déchets azotés notamment.
Ainsi la filtration se produit également entre les compartiments liquidiens de l'organisme, assurant le renouvellement du liquide interstitiel en particulier. Le liquide issu de la filtration n'est pas dans ce cas rejeté hors de l'organisme.